LIBERAL-GAUCHISME, DANGER !

L’islamo-gauchisme est à la une. Est-ce bien raisonnable ?

Le fait est  là : si elle n’a pas immergé le monde universitaire sous le flux de sa radicalité, l’alliance entre islamistes radicaux et extrémistes de gauche est avérée. À plusieurs reprises, elle a suscité des manifestations inacceptables dans un pays de liberté d’opinion, de convictions et d’expression. L’État se doit de réagir et de sanctionner en usant des lois existantes ceux qui entravent la jouissance des droits fondamentaux.

Ceci étant admis, il ne convient pas d’exagérer la puissance d’une alliance qui n’a pas plus de sincérité ni d’avenir que le pacte germano-soviétique de 1939. Entre le radicalisme religieux des uns et l’athéisme radical des autres, la compatibilité n’est pas soluble dans la République. Veiller attentivement au grain le temps de la circulation du tourbillon cyclonique est nécessaire, mais ne justifie pas que soit jetées avec l’eau du bain de mer les valeurs de l’humanisme.

Si le péril islamo-gauchiste doit mobiliser toute l’attention des démocrates, c’est aussi parce qu’il détourne les regards d’un danger autrement plus mortel : le libéral-gauchisme, l’alliance entre les dérégulateurs universels et les internationalistes révolutionnaires. Leur commune devise : liberté – égalité – fraternité. Encore faut-il savoir comment ils déclinent ces termes. Liberté fiscale, celle qui permet de détruire l’état par assèchement de ses ressources et d’accomplir le double rêve des libertariens d’une part, des anarchistes d’autres part ; égalité de tous devant le risque d’un monde sans frontière laissant à chacun le soin de choisir les frais d’assurance qu’il peut assumer, rêve des néolibéraux aux relents d’Internationale des non-peuples ; fraternité, enfin, de la famille choisie, celle du sang, des "amis" en mode Face de bouc et du pauvre utile, solidarité physique des racines sans les ailes conforme à la vocation apostolique des évangélistes, de l’universalité catholique (pléonasme) et des phalanstères. Depuis trente ans, à grands renforts de réformes, ce programme libéral-socialiste de priva(tisa)tion de la liberté, de l’égalité et de la fraternité met en place un modèle mondialisé de sociétés sans peuples ni classes que les gouvernements nationalistes ne combattent que le temps des discours électoraux – les voies contradictoires suivies par un Jaïr Bolsonaro, la libéralisation des prix agricoles par le gouvernement nationaliste indien et les grands écarts à s’en déchirer les adducteurs de Victor Orban replié dans son pré carré tout en voulant l’inscrire dans une communauté européenne ouverte aux vents du grand large, en donnent de bons exemples. Le gouvernement français peut déclarer la guerre aux séparatismes intérieurs, il sous-estime (comme bien d'autres), ignore ou tait la menace que les firmes transnationales font peser sur les populations en les réduisant à une masse de consommateurs/clients tout en affirmant – en même temps, cher Emmanuel – leur souveraineté en s’emparant des pouvoirs régaliens comme celui de battre monnaie (diem ou bitcoins), de faire justice (exclusion des contrevenants des réseaux sociaux) ou de développer une flotte de drones dont l’usage pourrait être détourné de leur fonction première de livraison. Le clientélisme nouveau est arrivé, il n’est pas moins arbitraire que l’ancien. Seul le goût de banane sans split permet de le distinguer comme un peu plus ludique que la mélasse originelle. À ce détail près, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme pour ne rien changer. Tant qu’il y aura des jeux, les petits empereurs règneront. La Corée du Nord n’en aura jamais été que le caricatural laboratoire.