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Le spectateur affranchi
6 octobre 2019

UN PERE CHOISI PLUTOT QU'UN BIO MAL PRESENT

pma« Je me sens solidaire de ces enfants qui sont stigmatisés parce qu'ils grandissent avec une mère seule ou deux mamans. Derrière les critiques, c'est la liberté des femmes à disposer de leur corps qui pose problème. » (Guillaume, né il y a 22 ans d’une PMA, Le Parisien, 5 octobre 2019).

« On ne pourrait pas être heureux sans père ? J'ai même lu que nous ne serions pas normaux. Qu'on arrête de parler à notre place ! C'est pour cette raison que je suis présent sur les réseaux sociaux. Lorsque je tombe sur ce genre de message, j'imagine un enfant, élevé par deux mères, le lire et les terribles répercussions que cela pourrait avoir. Je veux qu'il trouve aussi mon témoignage. Ce qu'on attend de la part de parents, c'est de l'amour et je n'en ai pas manqué. » (Bastien, né il y a 23 ans, élevé par un couple de femmes).

« Comment quelque chose que vous n'avez jamais eu pourrait vous manquer ? Je n'ai pas de père, mais je ne me sens pas amputée pour autant. Il n'est pas mort, il n'est pas absent ou défaillant, ce qui aurait pu créer un vide, mais ce n'est pas le cas. Je suis l'enfant d'un autre projet parental, peut-être moins classique, mais réfléchi et pas moins valable. […] J'ai été désirée à un point que je souhaite à tous les enfants. Je ne vois pas pourquoi maman, qui avait les moyens financiers de me prendre en charge, aurait dû faire une croix sur la maternité parce qu'elle n'avait pas rencontré la bonne personne. » (Marine, née il y a 19 ans, élevée par une mère seule).

Les Français se disputent pour ou contre la PMA en général, en faveur des couples lesbiens plus particulièrement, arguant contre la demande de ces derniers de la privation d’un père pour l’enfant à venir. Des manifestants défilent pour conspuer le projet de lois en cours de discussion à l’Assemblée et Mgr de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des évêques de France, a même fait « devoir » à ses ouailles de rejoindre le cortège du 6 octobre.

Faut-il refuser l’assistance procréative, surtout s’il n’y a pas de père annoncé ? Exemples et témoignages ne peuvent présumer de rien. En retranscrire quelques-uns à décharge n’est qu’une manière de répondre à ceux qui en brandissent d’autres à charge, le tout montrant seulement que, heureuses ou pas, ces expériences ne peuvent donner raison à aucune des parties. L’absence de géniteur déclaré est désolante si on en croit ceux qui en ont souffert ; mais les contre-exemples ne permettant pas d’en faire une règle, force est de trouver ailleurs meilleur argumentaire et, plutôt que de s’inquiéter de ce qui pourrait advenir si…, réfléchir sur ce qui est.

Or, dans cette perspective, la question qui mérite attention devrait être prioritairement celle de comment gérer l’existence effective (ou programmée) d’enfants nés (à naître) d’une procréation non conventionnelle et qui se sont (seront) sans père parce que nul homme ne s’est (se sera) proposé pour assumer ce rôle. Que fait (fera)t-on d’eux ? Que fait(fera)t-on de l’enfant né (à naître) d’un couple de femmes dont l’une accepte(ra) une relation naturelle avec un homme parce qu’elle est bisexuelle ? Que fait(fera)t-on des enfants nés d’une PMA à l’étranger ou grâce aux services très discrets de médecins sans scrupules ? Que fait(fera)t-on de l’enfant de la fille-mère que la société bien-pensante jette à la rue parce que le père a disparu ou n’est pas connu ? Que fait(fera)t-on de tous les orphelins de père, tous suceptibles de souffrir de l’absence bien que nul ne puisse assurer qu’il en ira ainsi ? Pourquoi interdire une assistance sur un tel argument ? Parce qu’il faudrait ranger tous les intéressés sur la ligne des plus malheureux ? « On verra après », assurent certains opposants au projet. Mais pourquoi remettre à des calendes absentes du calendrier quand c’est « maintenant » que le problème se pose ? Défendre les droits des enfants à naître est louable, mais le combat n’est-il pas hypocrite si sont ignorés ceux des enfants déjà nés ?

Refuser la marchandisation du corps, en revanche, est un juste argument, certainement le plus pertinent de tous. Faut-il cependant que ce refus ne se traduise pas par un interdit qui favorise son contraire : la marchandisation sauvage au profit de ceux que rien n’arrête. Pour éviter cet écueil, mieux vaut donc permettre une pratique gratuite de la procréation assistée, sous réserve de l’encadrer de règles précises et d’assurer les contrôles nécessaires à sa juste mise en œuvre plutôt que de parier sur le respect peu probable d’une loi. La prohibition n’a jamais empêché le délit. Elle n’a surtout jamais profité qu’aux trafiquants. Les punitions inscrites au tableau d’affichage du code pénal, y compris la peine capitale, ne retiennent jamais ceux qui se sentent assez malins ou protégés pour éviter d’y être soumis.

PS : plutôt que refuser l’existence à des enfants parce qu’ils n’auraient pas de père, donnons un père à ceux qui sont au monde sans en avoir un et peu importe s’il est ou non génétiquement compatible. Un père choisi vaut mieux qu'un bio tu l'auras... ou pas.

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